La Commune de Fillières

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2022-02

 

 

Distiller de l’eau-de-vie, mais pas à n’importe quel prix


De fin octobre à la mi-mai, les bouilleurs de cru sont sur le pont pour sortir la meilleure eau-de-vie possible. Le tout dans les règles, puisque la pratique est très encadrée, même si elle est moins surveillée que par le passé.

« Truander, ça voudrait dire quoi pour nous ? Oui, on pourrait voler quelques litres à chaque client. Ils ne le verraient même pas, puisque c’est nous qui au final nous occupons de tout et leur rendons le résultat des passes. On pourrait aussi déclarer moins ? Mais au bout du compte, on serait perdants, surtout si on se fait prendre, parce qu’on a une ferme à côté. C’est notre activité principale. On n’a absolument pas envie de trafiquer et de risquer de nous retrouver sur la paille. On veut pouvoir dormir tranquille. Et les gens sont contents et reviennent nous voir. »

La campagne de distillation de l’eau-de-vie touche à sa fin. Patrick Letscher et Jean-François Munier, deux agriculteurs céréaliers qui transforment les fruits en alcool l’hiver au sein de la société Aliorme, basée à Fillières , terminent une petite saison, soit quelques centaines de litres sortis de leur alambic de Villers-la-Montagne, au lieu des milliers de litres habituels.

 

Un agrément de la préfecture

Mais ils n’en démordent pas : leur pratique restera dans les clous. Les clous ? «  La distillation de l’eau-de-vie est en effet très réglementée. Il est interdit de la vendre et de la faire soi-même. Ce sont les règles de base. Ensuite, pour nous, il faut obtenir un agrément de la préfecture après avoir envoyé un extrait de casier judiciaire et des papiers d’identité. Il faut aussi être à jour d’impôts, avoir un matériel spécifique, et afficher les prix dans son local. Enfin, il est recommandé aux candidats bouilleurs de cru de suivre une formation de cinq jours. »
 

Tout est contrôlé

La préfecture envoie ensuite chaque année les dates qu’elle a retenues pour la campagne de distillation. « On ne peut pas travailler la nuit, ni le dimanche et les jours fériés. Et nos horaires doivent s’étendre de 6 h du matin à 20 h. Comme notre activité est soumise à des contrôles, ces derniers doivent pouvoir se faire en journée par les douaniers. »

Celles et ceux qui peuvent faire distiller doivent être de nationalité française et être propriétaires ou locataires d’un verger. « Les fruits doivent provenir de sa propre récolte. »

Quant aux privilèges, qui remontent à Napoléon souhaitant faire plaisir à ses soldats… « Ils permettent une exonération de taxes sur les mille premiers degrés d’alcool produits. Depuis 1959, ils ne sont plus transmis par héritage. Les derniers bénéficiaires meurent. Ce serait bien d’en remettre. Cela permettrait de faire vivre les arboriculteurs ou les bouilleurs de cru. Et cela amènerait de la diversité au niveau des arbres dans les campagnes, en lieu et place du béton. »

 

Interdit de circuler

Quand le client vient récupérer son eau-de-vie, plusieurs formalités sont encore demandées, sur des fiches : heures de cuisson, immatriculation du véhicule qui a le droit de transporter les bouteilles, etc. En dehors du trajet atelier de distillation-domicile, il est interdit de circuler avec de l’eau-de-vie, destinée uniquement à sa consommation personnelle. « Quand ils tombent sur deux ou trois litres dans une voiture, les douaniers sont tolérants. »

En résumé, tout dans la production de schnaps est contrôlé, cadré, etc. « L’État a besoin d’argent », concluent, pensifs, les deux agriculteurs.

Peu de fraudes et des douanes en amont


« Pour vous donner une idée, 7 543 personnes ont distillé lors de la campagne 2020-2021 en Meurthe-et-Moselle. Mais les fraudes sont très peu nombreuses, en comparaison avec le tabac par exemple. Et, de toute façon, ce n’est pas le cœur du métier. Il y a des contrôles, bien sûr. Dans chaque bureau, un pôle est dédié à ça, les contributions indirectes, mais l’essentiel de notre travail se fait sur la connaissance du milieu, et la réglementation est généralement bien connue », explique Florence Waller-Leitner.

La cheffe du Pôle d’action économique à la Direction régionale des douanes de Nancy ne peut pas donner les chiffres. Mais interroger les bouilleurs de cru, au nombre de 600 en France, permet de confirmer ses propos. Ils ne sont pas rares ceux qui disent n’avoir pas eu de contrôles depuis plusieurs années. Mais quand ils ont lieu, ils sont généralement ciblés et font mal.

« Un bouilleur de Hussigny-Godbrange a été arrêté il y a quelques années. C’est le seul à notre connaissance depuis une bonne décennie », explique l’un des bouilleurs de cru de Meurthe-et-Moselle, qui avoue n’avoir pas d’autre exemple de tentative de fraude dans sa carrière longue d’une quinzaine d’années.

Taxes et lois : des réactions contrastées


On l’aura compris, les lois et règles sont plutôt bien respectées en Moselle et Meurthe-et-Moselle. Et les taxes sont la plupart du temps payées. Mais les avis sont partagés chez ceux qui font distiller leur eau-de-vie par rapport aux neuf euros que récupère l’État par litre sorti.

Bertrand, de Longwy, ne voit pas le problème de payer cette taxe. « Tous les alcools sont taxés, et, dans ma famille où il reste un privilège napoléonien, on en paye depuis toujours. On n’est pas aux États-Unis où les gens subissent des lois et règles beaucoup plus dures. »

Bruno, de Forbach, estime que « l’alcool doit être taxé. Mais bien évidemment, l’argent doit être mis dans la lutte contre l’alcoolisme par exemple. En résumé : pour l’intérêt général. »


Yves, de Villers-la-Montagne, pourrait « digérer le fait que l’État soit partout et nous fasse les poches y compris sur ce sujet si cette somme était utilisée pour développer les services publics, et non pas les détruire, si c’était utilisé pour l’école, les hôpitaux, et pas pour augmenter les rémunérations des députés. »

 

Départ des élèves du cycle 3 du Regroupement pédagogique de Fillières-Ville au montois pour leur classe de découverte dans le Vosges.

Bon voyage et profitez bien de cette belle expérience. Merci à l'équipe enseignante et aux accompagnatrices.


Date de création : 13/02/2022 : 11:06
Dernière modification : 13/02/2022 : 11:06
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